L’intelligence artificielle en santé, entre craintes et espoirs

L’intelligence artificielle fait référence à la technologie qui repose sur la conception et l’utilisation d’algorithmes, conçus pour permettre à des ordinateurs de simuler l’activité intellectuelle humaine. 

Les outils d’intelligence artificielle se développent depuis plusieurs années et l’application de cette technologie dans le domaine de la santé alimente beaucoup d’espoirs, on voit ainsi se développer de nombreux acteurs dans le monde médical.

Les domaines d’application de l’intelligence artificielle en santé sont vastes. La technologie est utilisée entre autres pour prédire des maladies, diagnostiquer des pathologies, recommander des traitements personnalisés ou encore améliorer le suivi des patients. Domaine de recherche très prometteur, l’IA est au cœur de la médecine de demain.

Dans son rapport sur l’intelligence artificielle, remis en mars 2018, Cédric Villani fait de la santé, un secteur stratégique et propose ainsi de “former les professionnels de santé à l’usage de l’intelligence artificielle”.

Concrètement, ces systèmes permettent de libérer du temps pour les professionnels de santé en prenant le relais sur des tâches organisationnelles, analytiques, ou de résolutions des problèmes. L’IA est capable de traiter un très grand nombre de données, permettant la résolution de tâches de manière plus rapide et sécurisée.

Grâce à l’IA, les grands axes de progrès dans le domaine de la médecine sont les suivants:

  • Diagnostic : les algorithmes assimilent les caractéristiques des différents diagnostics et sont capables de les classifier. En cela, l’IA a la capacité d’analyser une grande sélection de données d’un patient (symptômes, habitudes de vie, traitements etc) pour ainsi proposer un diagnostic très précis et fiable. Dans ce cadre, un des défis majeurs est de garantir l’interopérabilité des différentes sources de données (fichiers médicaux, objets connectés, applications etc) afin d’offrir des analyses complètes.

  • Pronostic :  l’utilisation massive de données par l’IA permet d’améliorer le pronostic des patients en adaptant le traitement aux caractéristiques de la maladie et aux spécificités de chaque personne. Cette médecine de précision grâce à IA offre aujourd’hui la possibilité de prescrire les meilleures options thérapeutiques en fonction de profil bien particulier pour maximiser les chances de succès du traitement.

  • Reconnaissance d’images : l’intelligence artificielle permet d’interpréter l’imagerie médicale de manière optimale. Elle constitue une réelle  plus-value dans le diagnostic radiologique et un gain de temps pour les praticiens qui peuvent se focaliser sur d’autres tâches comme la relation avec le patient. L’IA est capable de faire le tri d’une masse importante de données, et peut ainsi conduire le radiologue sur une image à voir en priorité car étant évocatrice d’une pathologie grave. C’est le cas par exemple de l’application Aidence, qui va  dépister le cancer du poumon en détectant des nodules de quelques millimètres dans un grand volume, très complexe à l’œil nu.
  • Le suivi des patients: l’IA permet une véritable gestion des patients à distance. L’émergence des robots conversationnels ou “chatbot” permet de dialoguer avec les patients et d’analyser les réponses reçues afin d’alerter le médecin en cas de données anormales. Ce système assure un suivi régulier et sécurise le patient à distance, c’est également un gain de temps pour le professionnel de santé qui peut concentrer ses efforts là où son action est nécessaire. C’est le cas de l’entreprise Calmedica qui utilise l’intelligence artificielle pour dialoguer par SMS avec les patients avant et après une consultation et améliorer leur suivi.

Par ailleurs, la crise de la Covid-19 a accéléré le développement de l’Internet des objets ou Internet of Things (IoT). Ce sont des appareils connectés qui peuvent envoyer des informations à distance au médecin, qui pourra ainsi intervenir plus rapidement. Les patients gagnent ainsi en autonomie et leur sécurité est assurée à distance, sans besoin de se déplacer lorsque ce n’est pas nécessaire. Par exemple, dans le cas du diabète, un glucomètre connecté va permettre à un diabétique de suivre son taux de glycémie à domicile.

Le potentiel de l’intelligence artificielle en santé est immense et très prometteur si l’on appréhende les défis que cette technologie engendre.

Dans tous les domaines, la crainte que cette technicité prenne le pas sur l’humanité perdure. Il est donc nécessaire d’en définir le cadre juridique et éthique.

En matière de santé, l’IA ne doit pas altérer la relation entre le patient et le soignant, le lien humain est irremplaçable. Elle doit rester une aide pour le médecin, mais ne doit pas se substituer à celui-ci. Il s’agit également pour le corps médical de s’adapter et d’apprendre à utiliser ces nouvelles technologies, qui ont pour objectif d’épauler l’humain, pas de le remplacer.

Une autre difficulté que pose le développement de l’IA en médecine : la responsabilité du soignant. Actuellement, l’algorithme n’ayant pas de personnalité juridique, la responsabilité en cas d’erreur relève du droit de la responsabilité civile habituelle.

Cependant, à l’avenir, l’autonomie décisionnelle dont seront capables ces systèmes pousse à s’interroger sur la nécessité d’adapter les régimes juridiques existants pour s’adapter aux enjeux de l’IA

Enfin, l’IA soulève la question de l’exploitation des données.  Rappelons que pour fonctionner ces programmes nécessitent un accès à de nombreuses données. En Europe, la réglementation RGPD visant à protéger les données personnelles des individus ne définit pas de cadre précis pour l’IA. L’utilisation des ces données par l’IA doit ainsi suivre un cadre de régulation éthique, tout en évitant la sur-réglementation qui pourrait freiner l’innovation.